POUR UNE ECOLOGIE DE LA MUSIQUE VIVANTE

Publié le 2020-06-11
Temps de lecture : 5 min.
Les Allumés du Jazz
POUR UNE ECOLOGIE DE LA MUSIQUE VIVANTE
Les Allumés du Jazz

Bien qu'exclus de fait par le terme de "musique vivante" en tant que fédération de labels, (donc représentants des "musiques enregistrées"), bien que le problème majeur du streaming ne soit pas pris en compte à la hauteur de son enjeu écologique et malgré que nous soyons en désaccord sur un certain nombre de points (sur le fond et la forme), nous saluons et relayons cette initiative émanant de quelques musiciens de jazz et de musiques improvisées, relayée par GrandsFormats.
Si pour toutes les raisons indiquées ci dessus nous n'avons pas souhaité signer le document en tant que fédération, vous trouverez en bas de page le moyen de le faire individuelement 

A lire, par contraste avec ce communiqué :  Desartoxication 
A lire également sur le site du Monde Crise écologique : « L’idée qu’une somme de petites actions individuelles pourrait suffire est dangereuse »

COMMUNIQUE JUIN 2020
Appel des musicien·ne·s et des producteur·trice·s de musique engagé·e·s pour la transition écologique et la sauvegarde de la vie sur Terre

Nous, musicien.ne.s et producteur.trice.s de la musique vivante, exhortons l’ensemble des acteur·trice·s de la musique ainsi que la puissance publique à prendre des mesures face à un constat sans équivoque : nous entamons la sixième extinction massive de la vie sur Terre – la première extinction délibérée de l’histoire de l’Humanité.
Car si les désastres passés et en cours sont irréparables, nous voulons prendre aujourd’hui un virage radical et vertueux afin de protéger notre écosystème terrestre, préserver la richesse et la beauté du vivant.

L’écologie ne doit plus être un label de bien-pensance mais une pratique collective et un engagement politique. Nous devons transformer les usages de nos métiers et cesser de considérer la planète comme une ressource inépuisable.
Cela implique le renoncement à certains privilèges immédiats au profit d’une vision à plus long terme, cela implique d’affronter les dilemmes relevant de la responsabilité écologique qui se posent dans la production du spectacle vivant.

Car aujourd’hui, les artistes et les producteur·trice·s vivent des injonctions contradictoires, avec d’un côté l’exhortation à multiplier les représentations, notamment à l’international (toujours plus loin, toujours plus visible) et de l’autre la sommation des climatologues à limiter les émissions de carbone et réduire la production de déchets.

Les artistes, les technicien.ne.s, les producteur.trice.s partagent un réel dilemme : selon les usages aujourd’hui admis dans une culture mondialisée, gravir les marches du succès implique de s’enfoncer plus avant dans un système productiviste et énergivore - transports, matériel, consommables - qui participe à détruire notre écosystème. Dans ce contexte, réduire sa mobilité pour diminuer son impact écologique induirait ainsi de s’invisibiliser professionnellement.
Pour de jeunes artistes, cette prise de conscience est d’autant plus amère qu’elle fait« renoncer » à un modèle global de carrière qui ne semble plus viable ni responsable – mais qui malgré cela continue d’être promu comme la référence dans l’inconscient collectif et dans les écoles.

Les producteur·trice·s, quant à eux, subissent une double pression entre la nécessité de « faire du volume » afin de faire tourner leur structure - multipliant parfois les concerts isolés et événementiel à l’autre bout du monde -, et la pression exercée par les artistes qui voient en eux « l’homme ou la femme providentiel(le) » censés les mettre en lumière et développer leur carrière.
Enfin, la mise en réseau n’est pas encore une logique bien partagée par les diffuseurs - lieuxet festivals - qui s’attachent à promouvoir leurs événements propres sans s’inscrire dans une démarche de coopération qui permettrait de grouper les concerts. Par ailleurs, ceux-ci s’échinent souvent dans une course à la communication (teasers, goodies, accessoires des sponsors) et dans une programmation souvent éloignée de leurs aspirations premières, tant la pression économique est patente.

Nous devons changer de paradigme, écrire de nouveaux récits : le modèle de l’artiste “star” dont la valeur est calculée au nombre de tournées dans l’année, au nombre de spectateur·rice·s (réel·le·s ou dématérialisé·e·s), au nombre de disques vendus, à la taille et au prestige des salles de concert, à l’opulence de certaines productions, est tout simplement incompatible avec une société où la justice écologique doit se substituer à la logique économique.

Il est temps de changer de modèle.

Nous devons revaloriser, symboliquement, l’artiste qui agit localement : tissant des réseaux de partage sur son territoire, faisant germer des foyers de créativité dans toutes les strates de la population et construisant des projets au long cours et des collaborations pérennes avec les lieux et les habitants d’un même territoire.
Tout comme nous croyons à la relocalisation des industries et des entreprises, nous croyons également à la relocalisation de notre art.
L’objectif n’est pas de se couper de l’international ni de la richesse des échanges interculturels mais de les appréhender sous l’angle de l’immersion : au lieu de promouvoir des concerts uniques et isolés, privilégions les projets de longue durée accompagnés d’actions artistiques et culturelles dans le pays d’accueil.
Nous devons redonner à l’acte de voyager son caractère exceptionnel et précieux en menant des projets dont la valeur viendra aussi de la rareté.
Enfin, nous devons sortir de « l’obsolescence programmée » des créations : chaque année un nouvel album, un nouveau projet, une nouvelle création… qui conduit à une certaine précipitation et une surproduction généralisées, à tous les échelons.
Le virage ne pourra pas être entrepris par les artistes seuls : nous demandons aujourd’hui une convergence des acteurs de la musique ainsi que la mise en place d’une politique publique pour une écologie de la musique vivante.

LIEUX, SALLES, THÉÂTRES, FESTIVALS,
sortons du rapport marchand qui est à la source même de ce système

FINANCEURS PUBLICS, PARAPUBLICS, PRIVÉS,
sortons du rapport de tutelle aux directives souvent contradictoires.

TRAVAILLONS ENSEMBLE À OPÉRER CE CHANGEMENT RADICAL
C’est pourquoi nous soumettons des propositions détaillées que nous souhaitons discuter et mettre en place avec tou·te·s les interlocuteur·rice·s du secteur et en particulier les nterlocuteurs publics et parapublics (Etat, collectivités, sociétés civiles, fédérations, etc.).
Il n’est pas hasardeux de penser que la Culture pourrait subir plus tôt que prévu les mpacts directs du changement climatique : les canicules, pandémies, inondations et autres événements climatiques violents se systématisant, les assurances ne couvriront plus certains événements. Que ferons nous par exemple sans tous ces festivals d’été qui représentent une part colossale de l’activité culturelle et de l’économie du spectacle vivant ?
Ces prévisions doivent reconfigurer urgemment nos perspectives : n’attendons pas d’être au pied du mur pour imaginer un art vivant qui soit aussi art du vivant.

LE DOCUMENT DE LA MISE EN PRATIQUE ICI

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